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Le blog de Stephen Monod
31 janvier 2019

Du Parlement

Si Madame May a échoué à faire approuver le texte du Brexit, c’est peut-être en raison de certaines clauses du traité mais c’est aussi sans doute parce que les Communes se sont exaspérées d’avoir été tenues à l’écart des négociations et qu’à cet égard l’opinion publique partageait cet agacement. Considérant que le référendum lui donnait un lien direct avec le peuple, Madame May a oublié que dans une démocratie mature, le Parlement reste dépositaire de la souveraineté.

Ces circonstances illustrent l’inconséquence des pulsions césaristes qui agitent à intervalles réguliers la société française. Si l’on fait le difficile effort de chercher dans la logorrhée des gilets jaunes quelque chose qui se rapprocherait d’une pensée, on y trouverait le mythe du chef et l’illusion du peuple. Le chef est évoqué négativement, jusqu’à simuler son exécution mais il est omniprésent dans l’esprit des trublions. De même le peuple est l’objet d’incantations permettant à ceux qui les pratiquent de se confondre avec lui. Le schéma trinitaire du chef, du peuple et d’un lien noué entre eux par référendum au mieux, par plébiscite au pire, puise à la tradition bonapartiste que le premier des Napoléonides a eu l’habileté de rattacher à celle de la Révolution française. De Gaulle a ressuscité le schéma en concentrant les pouvoirs entre les mains du Président de la République, en limitant ceux du Parlement et en introduisant dans la vie politique française la pratique récurrente du référendum. La réduction à cinq ans du mandat du Président n’a pas modifié la concentration des pouvoirs entre ses mains mais a rendu celui-ci vulnérable en le privant de l’autorité du temps.

Face aux dérives du moment, la première urgence est de réconcilier les Français avec le régime parlementaire en leur rappelant que le mythe du chef conduit au pouvoir absolu et que si “Le pouvoir corrompt, le pouvoir absolu corrompt absolument“ (Lord Acton), en leur rappelant aussi que l’exercice de la contrainte par quelques individus en mal d’émotions collectives n’est rien d’autre que la dictature des forts en gueule.

La deuxième urgence est de trouver l’équilibre entre le besoin de stabilité et la nécessité pour chaque sensibilité de se sentir représentée, en ne touchant pas au mode de désignation de l’Assemblée Nationale et en lui conservant sa prééminence sur le Sénat mais en transformant celui-ci en une assemblée élue au scrutin proportionnel direct.

La troisième urgence est d’enseigner l’Histoire: la Troisième République a résisté à la Grande Guerre alors que le Second Empire a été balayé par celle de 1870; la défaite de 1940 ne se résume pas à une question de régime; si une majorité parlementaire rendue possible par un scrutin majoritaire avait permis à Mendès France de se maintenir, il est probable que la guerre d’Algérie se serait terminée plus vite et moins douloureusement qu’elle ne l’a fait.

 

 

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Commentaires
B
ils l'ont voulu le Brexit comme nous on a voulu Macron et bien quel gâchis...👍👏💋
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