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Le blog de Stephen Monod
5 octobre 2017

Du Droit des Peuples

Monsieur Macron se défend de commenter l’action intérieure d’un autre gouvernement de l’Union européenne. Aux Catalans blessés d’avoir voulu exercer leur droit démocratique le plus élémentaire - celui d’aller voter - l’Elysée refuse jusqu’à la compassion. Ce qui est vrai des pays de l’Union européenne le sera a fortiori du Monde. Dirigeants chinois, russes, turcs et autres pourront se lâcher joyeusement sur leurs peuples: les cris des victimes ne troubleront pas le sommeil –bref à ce que l’on en dit - du Président.

Cette appréciation marque un retour à une tradition ancienne que la diplomatie gaullienne traduisait d’une formule simple: la France reconnaît les Etats, pas les régimes. Autrement dit, un pouvoir étranger peut traiter ses habitants comme il l’entend pour autant qu’il ne déborde pas les frontières qui le séparent de ses voisins. Cette doctrine connut des exceptions. Jacques Chirac, témoin de la gestion par la police italienne des manifestations hostiles au G8 de 2002, exprima publiquement sa réprobation quand bien même ces manifestants étaient autrement plus redoutables que les électeurs catalans soucieux de glisser un bulletin dans une urne. Certes, une diplomatie d’Etat ne peut se réduire à la défense de principes mais il est des limites qu’intuitivement l’Honnête Homme perçoit. Elles ont été très largement franchies en Catalogne sans que Monsieur Macron ne le ressente: dommage.

Au-delà du traitement policier d’une consultation démocratique, se pose la question des pulsions centrifuges qui secouent certaines régions de l’Union européenne. Celle-ci et les Etats qui la composent sont avant tout schizophrènes. Ils s’accordent à vider les Nations de beaucoup de leurs pouvoirs au profit d’institutions communautaires. Cependant, ils s’étonnent que contemplant l’impotence grandissante des Etats et rassurées par le socle protecteur de l’Europe, certaines régions portées par une Histoire vraie ou rêvée, soient prises du frisson de l’indépendance. Cela ne veut pas dire que l’Europe suffise à expliquer les tentations sécessionnistes catalanes ou écossaises. Les Nations sont le fruit d’une unification plus ou moins forcée au fil des siècles et la résurgence des sentiments d’appartenance à des entités géographiques plus restreintes n’est qu’un retour de l’Histoire. Cependant, en ce qu’elle rend les Etats moins utiles, la construction européenne aide nécessairement les régions à se penser comme des Nations.

En cette matière, la règle doit être celle de la liberté. Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est un principe inaliénable au rebours de l’indivisibilité théorique des Nations ou même de la composition de l’Union européenne. Catalans, Ecossais et Anglais ont le droit de choisir leur destin, qu’ils aient raison ou qu’ils se trompent.

 

 

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