Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le blog de Stephen Monod
21 juillet 2016

De l’obscurantisme et la violence

La décence eut exigé que le temps du deuil fût celui du deuil. L’intelligence eut aimé que le temps d’après, fût celui d’une démarche collective. La décence fut ignorée et l’intelligence a depuis longtemps déserté l’espace public.

Pendant quarante ans, les princes qui nous gouvernent, ont affirmé avoir dans leur besace, une recette en kit contre le chômage. Désormais, les opposants du jour, semblables à ceux d’hier lors de l’affaire Merah, prétendent connaître le secret d’une sécurité immédiate. C’est un peu comme si en 1940, Churchill avait affirmé avoir une martingale pour éviter le blitz ou réduire Hitler en quelques semaines. Le principe de réalité disait Lacan, s’impose quand on se cogne: il s’imposera à ceux qui reviendront au pouvoir, s’ils y reviennent.

En ce que le terrorisme est la négation du principe d’humanité, personne n’imagine spontanément qu’il puisse durer autrement que par la carence des pouvoirs publics. Hélas, l’Histoire est tragique et le souvenir des terrorismes récents, irlandais, basque, de la bande à Baader et des brigades rouges, montre bien que le phénomène peut continuer au-delà de ce que l’on est prêt d’imaginer et qu’aucune mesure de police ne peut garantir une sécurité parfaite. Aussi étrange et choquant que cela puisse paraître, le terrorisme n’existe que parce qu’il y a des gens qui le soutiennent. Pour essayer de comprendre pourquoi la France est ainsi touchée, Gramsci et Marx sont paradoxalement plus utiles qu’une exégèse sur l’Islam.

 Longtemps, il fut de bon ton de critiquer l’idéologie dominante, prouvant ainsi qu’une idéologie existait et qu’elle était dominante. En réalité, jusqu’en 1989, deux idéologies concurrentes occupaient l’espace intellectuel français entraînant de loin en loin dans leur sillage, les opinions publiques: pour faire simple, Aron et Sartre. La chute du mur de Berlin en renvoyant le communisme dans les poubelles de l’Histoire, y a aussi placé les débats et les clivages que celui-ci suscitait. Or rien n’est venu les remplacer: plus rien à défendre, plus de lendemains collectifs à construire, plus de réflexion politique structurante. De façon très significative, la pensée s’est concentrée sur l’économie, c’est à dire sur une science qui n’intéresse largement que pour autant qu’elle débouche sur un projet politique et qui en l’espèce a surtout eu pour objet d’expliquer après coup les crises qu’elle n’avait pas anticipées. En clair, la société civile n’a plus été à même de produire des idées, des pensées, des valeurs susceptibles de réunir une population au demeurant disparate.

Ainsi vidé de toute pensée, le système s’est trouvé ramené à sa fonction marchande, d’assurer par une économie libre, la prospérité. D’un point de vue collectif, le succès n’est pas au rendez-vous, laissant souvent à choisir entre chômage et précarité.

 Sur un terreau intellectuel en jachère et un environnement économique difficile, l’obscurantisme et la violence ont su trouver leur place.

Publicité
Publicité
Commentaires
Le blog de Stephen Monod
Publicité
Archives
Publicité